lundi 19 avril 2010

La Cuillère d'Argent


Je dis souvent à mon fils que l'adolescence c'est des fois une maladie mais que ça se soigne.

La chronique adolescente J'ai Tué Ma Mère est d'une grande intensité.

Elle retrace les moments gauches entre un ado et sa mère.

Quand j'étais étudiant et que nous devions tourner un court-métrage mettant en vedette un jeune garçon de 9 ou 10 ans, on nous avait mis en garde de ne pas caster Xavier Dolan. Il avait l'âge requis et peut-être le talent mais on nous disait qu'il metterait notre set tout à l'envers car c'était un enfant pourri qui faisait absolument tout ce qu'il voulait. Des annonces de pharmacie le mettait en vedette et il dévorait l'écran avec sa frimousse.

Je ne tenais pas beaucoup à voir son film car je sentais que j'allais visionner une crise d'adolescence grand luxe sur pellicule.

C'en est une big time.

Tôt dans le film on se frotte à un insupportable ado. Arrogant, agressif, implusif, tonitruand. Franchement trop intense. Quand il demande sa mayo avec ses frites, on se sent irrité. On sent que "la spécialité" dont il se sent affublé l'oblige à faire de grands détours pour se rendre plus unique encore.

C'est au fond un ado comme il y en des tonnes.

Si le contenu du film nage dans la confusion toute adolescentine et la malhabilité parentale, la forme du film est tout à fait adulte. Il y a définitivement de beaux flash à certains moments. On y trouve même un caméo comique de Manuel Tadros, le vrai père à Dolan. Une scène de révélation au salon de bronzage est aussi parfaite. Pas de montage étourdissant, beaucoup de plans fixes, toute la place est laissée aux acteurs. Bon choix.
De toute façon les étourdisements viendront ds propos hurlés presque de bout en bout du film.

Mais il y aussi des moments difficilement supportables de confession à la caméra, de type journal intime. Des moments qui rappellent les pires moments de youtube.

Que cette thérapie par la tivi ait trouvé autant d'échos chez les médias me trouble et me choque.

Me trouble car je ne crois pas que le film ne mérite toutes les louanges que les critiques lui ont adréssés. Le mot "narcissique" ne s'y retrouve pas assez dans ses textes.
Me choque surtout parce que la plupart parlerons de ce film en soulignant "qu'il n'a que 20 ans...".

Sous-estimer sa jeunesse ainsi c'est la mépriser. Rien de nouveau au Québec. Il y a dans cette attitude "pas mal pour un kid" une condescendance cousine du "pas mal pour un film Québécois". Un souverain mépris. Comme si la fraicheur de la jeunesse ou la "Québéquitude" d'une oeuvre était le plus vil des défauts.

Il est peut-être maladroit le Dolan mais il a aussi beaucoup d'habiletés. Si il s'appelait Gilles Roussel, il aurait le flair de se trouver un nom plus vendeur.

Ce film est rempli d'un épuisant MOI mais le "moi" est tout à fait tendance. Sinon pourquoi une série au titre repoussant comme Tout Sur Moi trouverait un grand succès ici? (Et ce, Malgré que la série possède tous les ingrédients pour haïr les gens du plateau, ceux que l'on appelle "la clique".)


Ce film est plein de belles choses que l'on retrouve dans les films étudiants.

Car voilà ce qu'est ce film: un film d'étudiant de sa propre vie.

Un bon film d'étudiant comme il s'en refuse des centaines là où donne l'argent pour les terminer.

Je comprenda qu'on l'ait refusé plusieurs fois.
Mais je suis quand même content qu'il l'ai fait pareil.

Les subventions gouvernementales n'ont été impliquées qu'une fois le film de Dolan accepté au Festival de Cannes. Le film avait été refusé plusieurs fois auparavant par ces même institutions.

Dolan a une tête de cochon.
Et il fait encore ce qu'il veut.

C'est la plus belle qualité de son film.

Qu'il l'ai fait sans l'aide de personne.

Envers et contre tous.

Au mépris des dinosaures qui subventionnent ce dont tout le monde devrait parler.

Et je le répète l'adolescence est une maladie qui se soigne.

J'aime/J'aime pas.

Comme un ado.

(Louez-vous le délicieux À l'Ouest de Pluton à la place. Beaucoup plus généreux.)

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