lundi 9 août 2010

Fat Man


« C'était pour épargner des vies japonaises d'une destruction totale que l'ultimatum du 26 juillet fut formulé à la Conférence de Potsdam. Leurs dirigeants ont immédiatement rejeté cet ultimatum. S'ils n'acceptent pas maintenant nos conditions, ils doivent s'attendre à un déluge de ruines venu des airs comme il n'en a jamais été vu de semblable sur cette Terre. Après cette attaque aérienne suivront des forces marines et terrestres en nombre et en puissance telles qu'ils n'en ont jamais vu et avec les aptitudes au combat dont ils sont déjà bien conscients. »

Ce sont les mots de Harry Truman servis au japon le jour même du bombardement sur Hiroshima.

Cette fois, le gouvernement japonais passa sous silence l'ultimatum et ne formula aucune réponse officielle, se concentrant sur une façon d'obtenir de l'Union soviétique la garantie que son règne et sa sécurité seraient protégées.

Toutefois, pris de court par le bombardement de Hiroshima, Staline mit un terme aux négociations avec le Japon et décida d'entrer en guerre contre celui-ci dès le lendemain.

Le matin du 9 août 1945 à 3h49, le B-29 Bockscar partit de Tinian en direction du Japon. À son bord, la bombe Fat Man qui devait être larguée sur Kokura. Après 10 minutes de vol, le commandant Ashworth activa la bombe en chargeant les fusibles et ordonna de ne pas descendre en dessous de 1 500 mètres pour éviter une détonation accidentelle. Arrivé au-dessus de la ville vers 10h20, l'équipage de Bockscar affronta un problème : la couverture nuageuse à 70 % empêchait le bombardement. Après trois survols de Kokura, l'escadrille se dirigea vers Nagasaki, la seconde cible, pour procéder à un bombardement visuel des principales usines de la ville. Bockscar dut cependant faire face à un nouvel imprévu avec l'impossibilité de disposer du carburant de réserve.

À 7 h 50, une alerte aérienne fut donnée à Nagasaki mais fut rapidement levée aux alentours de 8 h 30. Quand les avions apparurent au-dessus de la ville vers 10 h 56, les Japonais pensèrent qu'il s'agissait d'avions de reconnaissance, alors courants, et aucune alarme ne fut donnée.

À 11 h 02, une percée dans les nuages sur Nagasaki permit au bombardier de Bockscar, le capitaine « Kermit » Beahan, de viser la zone prévue, une vallée avec des industries. Fat Man fut alors larguée et explosa à 469 mètres d'altitude. La détonation eut lieu entre les deux cibles potentielles : l'usine d'aciérie et d'armement de Mitsubishi au nord et l'usine de torpilles Mitsubishi-Urakami au sud.

Trois ondes de choc atteignirent l'avion.

Il existe à Nagasaki quelques particularités par rapport à Hiroshima. L’arme utilisée étant plus puissante (une puissance équivalente à environ 20 000 tonnes de TNT) les dommages proches de l’hypocentre semblent avoir été plus importants. L’agglomération étant divisée par plusieurs collines les destructions ont été moins étendues car les reliefs ont protégé certains quartiers. L’habitat étant plus diffus la violence des incendies fut plus limitée, ils mirent deux heures pour prendre des proportions importantes, avec une durée de quelques heures et il n'y eut pas de conflagration généralisée. L’arme étant d’un modèle différent (bombe à plutonium au lieu d’une bombe à uranium) la répartition du rayonnement γ et neutrons a été différente, ce qui semble avoir modifié la fréquence des types de leucémies observées.

Après le bombardement de Nagasaki et l'entrée en guerre de l'Union soviétique contre le Japon, les négociations s'activèrent. La fin de la guerre semblait proche mais les États-Unis préparaient le lancement d'une troisième bombe au cas où les deux premières missions n'auraient pas été suffisantes. Le capitaine William Parsons ne fut pas autorisé à quitter l'île de Tinian avant la reddition. Il devait en effet assurer l'approvisionnement et l'assemblage des bombes supplémentaires si le Japon persistait dans le conflit. Les militaires des États-Unis voulaient faire croire aux Japonais qu'ils disposaient d'un nombre illimité d'armes nucléaires. Les théories sur la troisième bombe sont multiples mais les témoignages se recoupent sur un point certain: une bombe supplémentaire ne pouvait pas être prête avant quelques semaines.

L'invasion soviétique au Mandchoukouo précipita la décision de Hirohito, le 9 août, il demanda à son garde des sceaux d'organiser une conférence impériale pour contrôler la situation car l'Union soviétique avait déclaré la guerre et débuté les hostilités contre le Japon. Au cours de cette conférence tenue dans la nuit du 9 au 10, l'Empereur annonça sa décision de se rendre à l'ultimatum des alliés et demanda la préparation d'une déclaration impériale à la condition que cette déclaration ne porte pas préjudice aux prérogatives de Sa Majesté à titre de Souverain.

Le 12, Hirohito informa officiellement la famille impériale de sa décision. Le prince Asaka, l'un des oncles de l'Empereur, lui demanda alors : « La guerre continuera-t-elle si l'institution impériale et la politique nationale (le kokutai) ne peuvent être préservées ? » Ce à quoi Hirohito répondit laconiquement : « Bien sûr. »

Le 14, pendant qu'une tentative de mutinerie d'un petit groupe de militaires opposés à la reddition était matée, Hirohito approuve la déclaration impériale et, le lendemain, livre son célèbre discours à la radio.

Le 17, il émit un communiqué aux soldats et aux marins leur ordonnant de déposer les armes et liant sa décision de procéder à la reddition à l'invasion soviétique du Mandchoukouo, passant sous silence les bombardements atomiques.

Le 2 septembre suivant, Douglas MacArthur préside la signature des actes de capitulation du Japon.

La guerre est finie.

La ville de Kokura a une raison de vénérer les nuages depuis.

le 9 août marque le triste 65ème anniversaire du bombardement sur Nagasaki.

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