mercredi 4 janvier 2012

Il y a un an...Mohamed Bouazizi

Mohamed Bouazizi avait 26 ans.

La vraie personnalité de l'année passée, en tout cas celle élue par le TIME sous le nom générique "le protestant" et avec lequel je suis plutôt d'accord cette fois était un mort. Je ne l'ai pas choisi moi-même parce que je trouvais ça plutôt déprimant, un mort. (Ce qui a aussi éliminé Jack Layton) Même si au fond, sa mort aura inspiré largement.

Mohamed était tunisien. Son vrai nom était Tarek Bouazizi mais pour le distinguer d'un autre qui portait le même nom, on le nomme Mohamed. Sa mère le surnomme Besbouss. Comme il est l'ainé de la famille et que son père est mort quand il avait 3 ans, il en devient aussi le support familial. Il quitte l'école rapidement et vers 19 ans devient marchand ambulant, vendant des fruits et légumes. Il pousse une charrette pour faire son métier et rêve de s'acheter une camionnette pour mieux subvenir aux besoins d'une famille de 7 enfants. Ne possédant pas d'autorisation officielle du gouvernement du corroumpu président Zine El-Abidine Ben Ali, il subit une administration à laquelle il ne peut verser de pots-de-vin et qui, pendant sept ans, se sert dans sa caisse, lui applique des amendes ou lui confisque sa marchandise, voire le total de ses profits du jour. Ceci le mène à croire qu'il n'y aucune justice pour les pauvres en Tunisie.

Dans ce gouvernement qui fonctionne à la corruption et aux intérêts personnels, Bouazizi est écrasé tel un microbe.

Le 17 décembre 2010, on lui confisque encore une fois son outil de travail (une charrette pleine et une balance). Essayant de plaider sa cause et d'obtenir une autorisation et la restitution de son stock auprès de la municipalité, il s'y fait insulter et chasser. Il se rend alors au gouvernorat pour se plaindre mais il n'y a personne pour l'écouter. 

Complètement désespéré devant tant d'injustices, il choisit de s'immoler par le feu sur la place publique. 

Gravement brûlé, il ne meurt pas tout de suite et passe du centre des grands brûlés au centre de traumatologie. Le président Zine El-Abidine Ben Ali rencontre la famille le 28 décembre et fait limoger les agents municipaux concernés. Depuis la veille, un mouvement social spontanné de manifestants en soutient à Bouazizi s'étend de municipalité en municipalité et atteint Tunis. D'autres suicides ont suivi depuis ainsi que des manifestations de grande ampleur réprimées dans le sang, dans le centre et le sud-ouest du pays. Bientôt la Tunisie au grand complet virera son vilain président. Le 14 il est forcé de fuir le pays (Certains de ses proches pour venir se cacher chez nous!). Ce mouvement de révolte par le peuple inspire d'autres pays.

Le printemps Arabe est né. Occupy Wall Street et autres dérivés sont aussi des cousins de ses mouvements de masse contre un système.

Le 17 décembre dernier, un monument commémoratif représentant le chariot de Bouazizi, entouré de chaises vides en symbole des dictateurs arabes déchus, est dévoilé sous les applaudissements de la foule.

Le romancier marocain Tahar Ben Jelloun a ses mots lumineux pour Bouazizi:
Un homme simple, comme il y en a des millions, qui, à force d'être écrasé, humilié, nié dans sa vie, a fini par devenir l'étincelle qui embrase le monde.

Vrai.
Certains ont prétendu que la famille de Bouazizi s'est rendue riche dans tout ça.
Tant mieux si c'est le cas.

Mohamed Bouazizi est mort aujourd'hui, il y a un an.

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