mercredi 28 mars 2012

Mathématiques Mentales Tronquées

Quand des amis à nous ont acheté une maison en région il y a 7 ans, ils avaient invité les proches (dont nous) à venir faire leur tour pour voir l'achat.

Suite à notre passage, discret, nous n'avions plus 20 ans, nous avions tous des enfants et nous n'avions pas fait la fête jusqu'aux petites heures du matin, (je me demande même si nous n'avions pas quitté avant le souper-c'était un dimanche), des voisins s'étaient présentés chez nos amis pour les avertir "de faire attention parce qu'il y avait des civics dans le secteur". Des "Civics" commes dans Honda Civic, voiture que je conduis. On s'était même questionné sur le fait qu'il était étonnant que le conducteur (moi) ne porte pas de casquette. Ça semblait aller ensemble. Ça coulait de source dans leur drôle de conception des choses. Un conducteur de Honda Civic et ses occupants étaient nécessairement un danger potentiel pour le secteur que nous avions visité.
Même si la voiture contenait une jeune femme tout ce qu'il y a de plus normale, une fillette de 1 an, un garçon de 5 ans et un homme qui ne connait même pas l'année de fabrication de sa voiture, ne s'intéresse en rien aux chars et ne regarde jamais suffisament sa propre machine pour remarquer lui-même qu'il y a des éraflures dessus.

Nous avions été étiquetté par une sorte de "paranoia collective".

Ça ne nous as jamais inquiété réèllement. Nous inspirant même à arborer la casquette pour rigoler lors d'un voyage au même endroit par la suite.

Quand ça se limite à ça, ça relève de l'anecdote comique. Un brin gênante pour les porteurs de préjugés mais bon, sans mal. Tongue-in-cheek disent les chinois. Les gens de cette région ne sont pas tous des gens mal avisés.

Aux États-Unis (et bientôt au Canada sous Harper peut-être) on défend "le droit de se défendre armé lorsque senti menacé". Ils ont construit leur pays de la sorte.

En 1895, la cour suprême a donné raison à un homme qui en avait tué un autre lorsque celui-ci s'était aventuré de manière menaçante sur son terrain. Craignant pour sa vie, le premier avait tiré. La loi "Stand Your Ground" est alors instaurée. La loi stipule qu'un homme qui se tient sur sa premisse, qui est victime d'une attaque sans en avoir provoqué l'assaut et qui au moment de l'attaque, croit de bonne foi avec un doute raisonnable, que sa vie est en danger peut alors se défendre avec les moyens qu'il possède.

Dix ans plus tard, même scénario, cette fois, les deux hommes étaient armés et l'un a été plus vite que l'autre. Il a été acquitté.

1921, un homme tire sur un autre qui brandissait un couteau. On applique alors quelques nuances, le tueur est condamné quand même car il aurait lui-même pu user de simple menaces et non tirer tout de suite.

Depuis mai 2010, 31 états ont adopté cette loi. 4 autres étudient de le faire. Parmi les 31 qui ont cette loi: la Floride.

En Floride, un Homme peut tirer sur un autre si He or she reasonably believes that such force is necessary to prevent imminent death or great bodily harm to himself or herself or another or to prevent the imminent commission of a forcible felony. Traduction libre: Lorsqu'il ou elle croit, avec un doute raisonnable, qu'une force de cette nature est nécessaire afin d'éviter de mourir ou d'être gravement bléssé, ou que quelqu'un d'autre ne meurt ou soit gravement bléssé et dans le but d'éviter qu'un crime ne soit commis.

Le 5 mars dernier, Trayvon Martin, 17 ans, avait à la main un sac de Skittles et un thé glacé et parlait au téléphone avec sa copine.
Il est afro-américain, il portait un "hoodie", un survêtement à capuchon. Il pleuvait ce soir-là, il se dirigeait vers chez lui. Dans ce quartier de la Floride, des gens y habitant (ou tout près), se relaient chaque soir pour "surveiller" le quartier. Ce que l'on appelle quelques fois les neighborhood watchs.

George Zimmerman a 28 ans. Il a toujours voulu être policier. Il n'avait pas ce qu'il fallait, il a toujours été refoulé.
Comme bien des Étatsuniens (et bientôt des Canadiens) il porte une arme quand il fait ses patrouilles de secteur. C'est lui qui était de faction le 5 mars en soirée. Il n'est pas raciste dit son avocat, il est hispanique (comme si il y avait lien de cause à effet!).

Afro-américain, survêtement à capuchon, courant sous la pluie, ces trois détails ont suffit à George Zimmerman pour classer mentalement Trayvon Martin dans la catégorie "louche". Un calcul probablement erroné, assurément fatal. Il fait d'abord la bonne chose, il appelle le 911 afin de parler d'un "suspect". La police lui dit de ne pas approcher le dit "suspect", qu'ils envoient de leurs hommes sur place.
Ce qui s'est passé entre l'arrivée des policiers et la mort de Martin est extraordinairement vague. Ce que l'on sait c'est que Zimmerman a tiré sur Martin, le touchant mortellement.

Zimmerman a été interrogé, a plaidé la légitime défense, et a été aussitôt relâché. Le jeune Trayvon Martin n'était pourtant pas armé.

En ce moment, la marmite bouille autour de cet horrible incident. On ne croit pas du tout que justice n'a été rendue. Même le président des États-Unis y a mis du sien. La mobilisation s'organise pour que la lumière soit faite sur ce qui est incompréhensible pour bien des gens. L'équipe professionnelle de basket du Miami Heat y a été d'une geste passablement touchant récemment en faisant un clin d'oeil au survêtement du jeune disparu.

Mais de nos jours, chacun comprend bien ce qu'il veut comprendre.
Traduit ce qu'il croit traduire bien.
Fait des maths dans sa tête à sa manière.

Ce sont les manières qu'il faut réétudier.
Partout.

Je retourne prochainement chez mes amis en région.

J'ai acheté des vestes anti-balle pour la famille...

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