mardi 16 décembre 2014

Pynchon Par Ici, Please

Le nouveau film de Paul Thomas Anderson mettra en vedette Joaquin Phoenix (entre autre) et est une adaptation du roman de 2009 de Thomas Pynchon "Inherent Vice".

L'adaptation d'un roman de Pynchon en soi, se mérite une note d'attention. Personne sur terre n'a un jour adapté un roman de Thomas Pynchon en film. Pour les mêmes raisons que personne n'a un jour réussi à entrer l'ensemble du choeur de l'armée rouge dans une Ford Focus. Si un jour vous vous attaquez à tenter d'adapter Gravity's Rainbow (Pynchon, 1973) en film, vous réussirez peut-être, mais aurez perdu l;a tête en cours de route.

Alors comment Paul Thomas Anderson s'y est pris pour s'attaquer au génie?

Premièrement, de tous les romans de Pynchon, (il en a 8 en 50 ans) Inherent Vice est de loin le plus drôle. Situé dans le Los Angeles de 1970, l'histoire du détective Doc Sportello contient suffisamment d'indignations qui sont encore  autant de refus et de "non choix" de la classe moyenne de nos jours. Le récit de Pynchon est aussi le plus concis et le moins éparpillé. C'est tout un cerveau de mathématicien que celui de Pynchon et ne s'y aventure pas celui qui n'est pas armé pour déchiffrer de multiples textures et dénombre une large quantité de personnage.

Dans le théorème d'Inherent Vice, il y a le détective privé Doc Sportello qui reçoit la visite de son ancienne amie de coeur (Katherine Waterson) maintenant en relation avec un développeur immobilier qui à la tête d'Eric Roberts. Grand frère de Julia, qui ne joue jamais les gentils garçons. Toutefois le personnage de Roberts a aussi une épouse, une anglaise, qui elle aussi, a un amant. et qui a des plans de débarras envers lui. Disparaissent alors ceux qui ont approchés Sportello. Puis ce dernier est à son tour envoyé dans le monde des rêves. Sportello se réveille près du cadavre d'un garde du corps du développeur immobilier.
Dans une intrigue parallèle, qui ne le sera pas du tout au bout du compte, une autre femme, une junkie (Jena Malone) vient voir Sportello afin de lui parler de son mari (Owen Wilson) qui a disparu mais qu'on sait vivant. Du moins on le croit. Well Doc, can you do somethin' about it?

Si l'intrigue vous rappelle Thomas Chandler et The Long Goodbye adapté de Robert Altman en film en 1970, vous n'êtes pas con. Les similitudes sont nombreuses. Mais si avec Philippe Marlowe il y avait une solution, avec Pynchon, chaque fois qu'on croit avoir dompté le monstre, une nouvelle créature plus horrible naît ailleurs qui nous confirme une vision de la société devenue complètement désaxée.

Est-ce qu'Anderson réussira à dompter le monstre Pynchon sur deux heures trente? C'est un défi énorme et je crois qu'il a le talent pour le faire. Est-ce que le public suivra? Je ne crois pas. Pynchon n'est pas un artiste qui se livre "à la demande du client".

Il se livre au déploiement de son talent.

Benicio Del Toro joue Sauncho Smilax, un avocat qui est aussi un marine. Hong Chau incarne une employée de salon de massage qui est aussi l'abri d'un cartel d'héroïne. Martin Short joue le Dr. Blatnoyd, qui n'échappe jamais à une ligne de cocaïne dans ses kits tout en velours. Sasha Pieterse incarne une adolescente retournée à ses parents par Sportello, pour mieux reprendre le sentier du vagabondage.

American life was something to be escaped from.

Maya Rudolph, Josh Brolin, Reese Whiterspoon aussi au générique.

Paranoïa & marijuana, toutes deux interchangeables en 1970 sur la côte Ouest, suggèrent aux personnages qu'ils peuvent être tout à fait sur place lors d'un évènement et aussi complètement ailleurs.

La nature même du cinéma.

L'aveuglement et la confusion de la société d'alors nous plante directement celles d'aujourd'hui, souvent la même, en pleine face dans l'histoire de Pynchon.

Inherent Vice est un miroir qui renvoie une image stone.
Vos yeux ne lâcheront plus le téléphone vert de Sportello.

Neil Young s'invite dans la trame sonore, puisque Pynchon a une oreille incroyable pour son époque.
Et des antennes impressionnantes sur la vie en général.

C'est le tout premier film qui adapte Pynchon et c'est peut-être aussi le dernier.

Parce que Pynchon est une bête sauvage.

Et celles-ci ne sortent la tête que très rarement.

PTA a lancé son adaptation le 12 décembre aux États-Unis d'Amérique.

J'ai hâte qu'il soit aussi lancé au Canada d'Amérique.

Pynchon pour Noël, ça serait swell.

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