dimanche 14 juin 2015

Le Studio de Morin Heights

Le 1er juin 1969, André Perry s'illustre en enregistrant dans la chambre 1742 de l'hôtel Reine Elisabeth au Centre-Ville de Montréal John Lennon, Yoko Ono et une chorale d'amis, d'amateurs, de journalistes et de curieux Give Peace a Chance.

Il le fait en utilisant un magnétophone Scully à quatre pistes et une console d'enregistrement 8 pistes.

Le succès de la chanson du Bed-In de John & Yoko lui fait une belle publicité et Perry, sa femme et Nick Blagona, font prendre de l'expansion au modeste studio montréalais. Il fait construire en 1971 un studio complet d'enregistrement de musique dans le secteur des Laurentides, à Morin Heights, là où Perry est propriétaire d'une résidence près d'un lac.

Alors que la plupart des studios d'enregistrement de musique sont principalement situés en ville et restent très citadins, le studio de Perry fuit le bruit et reste pour sa part, très en région, près des montagnes, là où on peut se ressourcer davantage.

Le studio comprend à l'origine une maison d'invités située à une demie-heure de route. Toutefois, Ian Hunter de Matt The Hoople & le producteur Roy Thomas Baker provoquent accidentellement un incendie dès les première années, ce qui ruine la maison d'invités.

C'est en 1974 que démarre vraiment la notoriété du studio, alors baptisé simplement "Le Studio". C'est Cat Stevens qui cette année-là y enregistre son 9ème album. Il s'agira d'un album concept à saveur de science-fiction. L'un de ses pires. L'album déroute fans et critiques. Mais ce n'est pas la faute du studio. Stevens commence à s'intéresser à l'Islam et ne veut plus répondre des diktats de la maison de production qui veut des hits. Jean Alain Roussel, originaire des îles Maurice, mais habitant le Québec y est second au générique de l'album derrière Cat Stevens.

En 1975, Les Bee-Gee's y passeront 5 mois pour l'enregistrement de leur album Children of the World. Ils y enregistrent 10 chansons avant que Barry Gibb ne finisse le mix à Miami.

Le 21 juin 1976, au parc du Bois-de-Coulonge à Québec, et à Montréal sur le Mont-Royal deux jours plus tard, on enregistre dans le cadre de la fête nationale du Québec le spectacle mettant en vedette Robert Charlebois, Gilles Vigneault, Claude Léveillé, Yvon Deschamps et Jean-Pierre Ferland. Mes parents sont au spectacle de Québec, l'album aura une place de choix dans la collection de vinyle à la maison.

La formation canadienne The Lavender Hill Mob y enregistre ses deux premiers album en 1977 et 1978. Le comédien Russe Vladimir Vyssotski y enregistre aussi en français. Nazareth y enregistre son 9ème album.

En 1978, la formation étatsunienne Crack the Sky y enregistre son troisième album.
L'année suivante, la formation canadienne April Wine y enregistre son 8ème album.
Le groupe Chicago y enregistre son 13ème album.

En 1979, la formation Rush y crééra des vagues permanentes avec un album qui introduit pour la première fois l'utilisation du synthétiseur de la part de Geddy Lee. L'album sera leur premier dans le top 5 des meilleures ventes d'album au pays.

En 1981, bien que le reste de leur album est enregistré déjà, Sting, Stewart Copeland et Andy Summers, mieux connus sous l'appellation de The Police, y réarrange et réenregistre une vieille composition de Sting de 1976 pour en faire un single. Jean Roussel est celui qui arrange la partie au piano du morceau.

Cette même année, Rush revient au studio pour y enregistrer l'un de ses plus fameux albums.
Un jeune Bryan Adams y enregistre son second effort.

Rush réinvestit le studio en 1982 pour un autre excellent album. Le synthétiseur est maintenant pleinement intégré au son du band de l'Ontario.

The Police, tout comme la dernière fois, enregistre l'ensemble d'un album à Montserrat dans les caraïbes, mais vient faire le mix au Québec. Un par un, car Copeland & Sting en viennent presqu'aux coups pendant Every Breath You Take.  Asia & Bryan Adams y enregistrent aussi en 1983.

Rush adore le studio, ils y reviennent en 1984. David Bowie y enregistre aussi son 16ème album la même année. La première chanson de cet album me fera aimer Bowie à vie.

Corey Hart y enregistre son album le plus important en 1985. Glass Tiger son seul d'envergure l'année suivante. Kim Mitchell et Luba y enregistrent aussi en 1986.

Cette année-là Le Studio est coté en bourse afin d'amasser des fonds pour construire un second studio qui aurai de meilleures capacités audio et vidéo dans l'État de Washington aux États-Unis. Des parts de 1.1 millions à 3,50$ l'action sont ainsi acquis afin d'investir dans le vidéo digital et la musique de film. Une salle de synclavier est aussi installée à Morin Heights.

Le band de metal progressif Queensrÿche est justement originaire de l'État de Washington, mais enregistrera son troisième album à Morin Heights en 1988. The Northern Pikes y enregistrent leur second effort la même année. Keith Richards y enregistre son tout premier album solo. Paul Piché y enregistre son 5ème album.

En 1988, André Perry vend son studio qui sera acheté par l'équipe Spectra. Ceux-ci le rebaptise Studio Morin Heights. Perry se retire définitivement en 1993.

Entre 1989 et 2002, Rush, The Jeff Healy Band, Rush encore, The Barenaked Ladies, Gowan, Rush toujours, Sarah McLachlan, Julie Masse, Kate & Anna McGarrigle, Moist & The Tea Party y enregistrent aussi.

Le studio est visible en partie dans les clips de Tom Sawyer, Limelight & Vital Signs de Rush ainsi que dans celui d' I Like to Rock d'April Wine.

En 2007, le studio autrefois recherché, devient dépassé. Le terrain et l'endroit est à vendre. En 2008. Le Studio Morin Heights ferme.

L'endroit est à l'abandon et le montréalais Richard Baxter voudrait bien sauver ce qui a déjà été l'une des niches à succès des plus importantes au début des années 80. Il a lancé une campagne de financement kickstarter afin de tenter de récolter les 2.4 millions nécessaires pour mieux apporter la réhabilitation désirée.

Le studio mythique à un avenir incertain.

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